DOUX JARDIN 2014 – POEMES

Par un beau dimanche de juin, voici ce qu’ont écrit, petits et grands, au cours d’un atelier d’écriture animé par Robert : des « Poèmes-paysages ».


« Je vois – j’entends – je sens – je touche – je goûte – je vois »


Virginia Zajdel

Je vois en mon cœur cet effroi d’être seule

J’entends mais ne vois rien au-delà du bout de ce nez

Je sens qu’il doit enivrer, ce café, comme les odeurs du printemps que j’avais tant aimé

Je touche cette chaleur chère à mon cœur qu’un sourire transporte, éphémère à souhait

Je goûte l’envie de m’évader vers un passé, un futur, une envie de vivre le présent à toute allure

Je vois en ce cœur tant effrayé de ne plus être seule des personnes au cœur de lecture


Amalia

Je vois des jolies fleurs oranges et leurs feuilles vertes

J’entends les oiseaux et les cris des enfants heureux ou pas

Je sens plein de choses qui se mélangent dans mon nez

Je touche la table rugueuse qui a vécu longtemps

Je goûte le chaud du chocolat chaud

Je vois ce que je vois et c’est tout


Agnès

Je vois un arbuste rose fuchsia dont la couleur chatoyante me réjouit le cœur

J’entends le chant de Marie-Pierre dans le fond du jardin et le sifflotement des oiseaux dans une belle harmonie de vie

Je sens l’air frais et humide qui pénètre et me rafraîchit les narines

Je touche délicatement mon arbuste fleuri et découvre de multiples petites épines. Dans le même temps, la froideur de la pierre mouillée m’agresse le fessier

Je goûte aux sensations multiples de douceur et de dureté alors qu’une abeille potentiellement dangereuse butine voluptueusement le pollen sucré d’une fleur délicate

Je vois mon arbuste fuchsia dans toute la complexité, douceur et douleur confondue, délicatesse et robustesse réunies, délice pour les yeux et douleur pour la peau arrachée


Séphora

Je vois un sombre tunnel, un entrelacement sinueux de branchages vivants

J’entends les oiseaux chanter, les abeilles bourdonner, les arbres bruisser, j’entends la nature ; on perçoit au loin une musique et les voitures qui passent, seule trace de la civilisation

Je sens les fleurs, l’herbe fraîche, un léger parfum de pluie, je sens le calme et la tranquillité, ainsi qu’une odeur indéfinissable, celle de la nature

Je touche les pétales soyeux des fleurs, la rugosité de l’écorce, la froideur du métal, la molle solidité du sol sous mes pas

Je goûte le vent, la fraîcheur parfumée de l’air embaumant le jardin de ses subtiles variations

Je vois le tunnel, rendu soudain joyeux par le soleil perçant derrière un nuage, je vois les feuilles vertes qui frôlent mes joues et je souhaite rester sous ce toit de verdure


Félix

Je vois des armures et des reconstitutions en métal, mais surtout je vois une feuille pleine de ratures

J’entends les oiseaux qui chantent l’arrivée du printemps…ha…l’hiver viendra…

Je sens les fleurs du printemps arrivées depuis quelques temps, vivement l’hiver !

Je touche du bois (ha ha !), mon stylo, cette feuille horriblement pleine d’encre

Je goûte au poing de mon frère, les tranchées sont creusées, la guerre est déclarée

Je vois les grilles vertes qui m’enferment avec des oiseaux moqueurs, l’hiver viendra, l’hiver viendra…

 


Christiane

Je vois le panneau rouge de la « Mare aux dragons », les seins-passoire de la dame au chevalier de fer, les bourdons gourmands sur les centaurées

J’entends un doux air d’accordéon, le bruissement des insectes sur les églantiers, la plainte du facteur tombé dans l’escalier

Je sens tous les parfums d’un jardin paradis

Je touche le tronc rugueux du vieux saule, le plumeau d’un fenouil, très doux sous les doigts

Je goûte le piquant des radis, la sauge amère

Je vois les bourdons repus, immobiles sur les centaurées


Nils

Je vois des arbres et des pierres

J’entends des vélos, des voitures, des camions, le bruit du vent

Je sens des fleurs, des plantes, des légumes, des fruits

Je touche des escargots, les troncs des arbres

Je goûte des groseilles à peine rouges, de la viande (de hérisson ?) ; j’aimerais goûter les fraises du jardin et le clafoutis aux cerises et aux pommes

Je vois des gens qui passent, et des oiseaux


Kevin

Je vois le vent tout autour de moi

J’entends au loin les oranges qu’on s’empresse de presser pour l’heure du brunch tout près

Je sens les roses un peu fanées un peu farouches

Je touche le rugueux gris de la table sous mes doigts, adouci par le toucher des doigts d’antan

Je goûte le petit noir qu’on m’a gentiment proposé

Je vois et j’entends, je sens et je touche, je goûte et je déguste…les couleurs de la vie


Lou

Je vois les feuilles qui se balancent au gré du vent, les belles fleurs blanches et de couleurs

J’entends le vent, les bruits des voitures, l’accordéon, ma respiration, le bourdonnement des insectes,….la nature

Je sens une forte odeur qui emplit mes narines,  elle me pique tellement ; je sens la nature

Je touche mon stylo qui écrit selon mes désirs

Je goûte des pétales de fleurs comestibles, bien sûr en salade, mais non, je n’ai rien goûté…

Je vois des ballots de paille qui, eux aussi, se balancent au gré du vent, et je vois toujours les jolies fleurs blanches et de couleurs


Emile

Je vois les fleurs du printemps et l’eau presque claire des trois mares, les tritons ou grenouilles qui gobent les mouches, et les nuages, hélas, d’un gris profond et parfois clair, dont les oiseaux et moi-même ne sont pas contents

J’entends l’accordéon de ma mère qui chante, respire ou soupire, accompagnée par les rouges-gorges, les mésanges se régalant d’un festin d’insectes

Je sens les mille et une fleurs de ce merveilleux jardin qui chante et joue avec le vent qui apporte les odeurs lointaines de la paille fraîche dans l’abri de la mare aux dragons

Je touche le bois plein de sève, les insectes aux couleurs chatoyantes et parfois par erreur l’ortie qui pique et qui gratte

Je goûte la mouche que je gobe, et les fruits qui mûriront bientôt, et les légumes si beaux que parfois j’en rêve…

Je vois les roses printanières et l’eau ni propre ni foncée des bassins, et leurs habitants qui gobent les insectes imprudents ; je vois des volutes de vapeur, là-haut, presque noires, dont personne n’est content

 


Titouan Ch.

Je vois un jardin banal

J’entends une musique vers le fond du jardin

Je sens une drôle d’odeur à côté du viburnum opulus

Je touche le rosa rugosa…aïe aïe aïe

Je goûte un drôle de fruit sur un arbre nommé castanea sativa…beurk beurk beurk

Je vois maintenant que ce jardin n’est pas normal, peut-être même dangereux, alors vous, simples humains, méfiez-vous de ce jardin !


Annie

Je vois deux fraises bien mûres, rouges écarlate sur fond de terre, qui me font un clin d’œil

Je les entends qui murmurent « mange-moi…je suis sucrée et acide, juste ce qu’il faut… »

Je sens que je vais avoir beaucoup de mal à leur parfum

Je touche et caresse tendrement leur surface légèrement râpeuse

Je goûte…ah non, je ne goûte pas, hélas !

Je vois deux fraises bien mûres qui me font un clin d’œil, sûr, elles sont à croquer !


Léonard

Je vois des plantes qui fleurissent, je vois les nuages qui se déplacent et je vois des peintures qui me réjouissent

J’entends les téléphones sonner, j’entends la musique de mon accordéon, j’entends les croassements des grenouilles et le cri des canards

Je sens l’odeur des fleurs de sureau, je sens l’odeur du plaisir d’écrire, je sens l’odeur du romarin et de la lavande cachés dans le Bizardin

Je touche l’herbe mouillée par la pluie, je touche mon stylo, ma feuille et ma planche, je touche le tronc d’un arbre qui pousse

 


Victor

Je vois des gosses et des grands cherchant à utiliser leurs sens pour réussir à tenir ne serait-ce qu’un bout de la consigne ; je vois une araignée tentant de découvrir l’encre de mon stylo

J’entends des bruits de pas nets, foulant l’herbe de lampes inodores

J’entends ce que je ne vois pas, étant aveugle d’un œil, j’ai pu développer mon oreille droite à tous types de bruitage ; cela m’a permis de laisser mon stylo sur l’oreille

Je, sans thé, reste éveillé pour pouvoir sentir les ailes des abeilles laissées là au hasard, et la tasse de café…Bougez-la !

Ayant un toucher très faible, j’érafle les ronces et les orties pour avoir la sensation de vivre

Je goûte…j’ai attrapé un rhume, est-ce l’atmosphère ? Je ne sais pas


Valérie

Je vois une petite fleur violette dont je ne connais pas le nom, cachée sous les buissons

J’entends le vent qui agit dans le second tremble

Je sens mes pieds humides de la rosée du matin

Je touche le léger duvet des feuilles de notre kiwi, toujours infertile

Je goûterai bientôt aux beignets aux ombelles de sureau

Je vois, cachée sous les buissons, une petite fleur violette dont je ne connais pas le nom


Choses qui… A la manière des « Notes de chevet » de Sei Shônagon (Japon, XIè siècle)


Choses qui résistent

Qui résiste mieux, dans l’esprit populaire et hélas… dans la réalité ? Si ce n’est… les nuages du Nord (Kevin)

La poubelle de plastique résistant à l’étreinte de la nature comme une tache d’encre oubliée (Victor)

Les arbres au tronc dur, les pierres du mur de brique (Félix)

Les abris en bois, les mosaïques près des mares et dans le potager, le panneau « Marchouette », les cuves en plastique, le petit bric-à-brac qui ne sert à rien et qui se cache derrière l’abri… (Lou)

Deux pierres grises, oranges, ou même blondes, la nature qui envahit ce jardin petit à petit, la verdure qui repoussera toujours malgré le fait qu’on taille et retaille et coupe et recoupe (Titouan)

Les troncs, les rochers, un vieux tronc où les insectes et oiseaux peuvent trouver un logis (Emile)

La tonnelle blanche et son armature métallique, la porte blanche et son champ de fleurs sauvages, la palissade de ciment qui ceint le jardin de sa grisaille austère, le grillage vert qui lui fait face et protège les plantations des envahisseurs, les groseilliers et cassissiers qui ont traversé l’hiver sans dommage (Agnès)

Les troncs d’arbres, les grosses pierres, là où est assis Victor (Nils)

Un écriteau, à peine visible dans la forêt de végétaux, le jardin, toujours en constant changement, toujours aussi fidèle à lui-même (Sephora)

Le lien qui unit le tremble et la sculpture, le chevalier armé et sa compagne (Valérie)

Les ronces derrière la butte, les merveilleux boutons d’or envahissants (Christiane)

Les sculptures en métal, la pierre, les tuiles, une brouette… (Léonard)


Choses qui ne font que passer…

Il fait beau tous les jours dans notre région… au moins quelques instants, car c’est promis, ils ne font que passer (souvent !) nos amis… les nuages (Kevin)

Les insectes, les fleurs, un oiseau…les insectes qui butinent les fleurs, qui arrivent et repartent selon les saisons, les oiseaux qui filent (Emile)

Moi, écrivant une suite de mots insensés d’une écriture déplorable et grotesque (Victor)

De nombreux organismes vivants, abeilles, oiseaux, humains, insectes… ; la pluie, le soleil, les saisons, mais surtout, ne font que passer, les grenouilles de la mare ou des mares, et les rares moments de désolation (Titouan)

Les insectes qui volent vers leur ruche, les oiseaux qui filent au-dessus du jardin (Lou)

Jeanne et son partenaire de foot qui s’en donnent à cœur joie, le hérisson coquin qui traverse, l’air de rien (Agnès)

Les personnes (Félix)

Les insectes, les moucherons aussitôt apparus, aussitôt disparus, les fleurs, si vives, roses, blanches ou mauves aujourd’hui, mortes demain (Séphora)

Les papillons qui volent (Nils)

Le vert (Valérie)

Les fleurs de l’églantier de mai (Christiane)

Les personnes, les oiseaux, les groseilles pas mûres, les papillons (Léonard)


Choses désolantes

Les jours de grise mine, quand notre âme et notre corps ont besoin de lumière, ces choses au-dessus de nos têtes nous désolent. Ce sont… les nuages  (Kevin)

Le houx, les ajoncs qui piquent (Nils)

Les grilles de fer autour du jardin, mon frère (Félix)

Le Gratte-nuages tordu (Christiane)

L’odeur nauséabonde au fond du jardin, ces sacrées poubelles (Valérie)

Le dragon de métal rouillé, les déchets qui trainent, les orties qui envahissent le Bizardin (Lou)

La cabane de bois mort arraché à la terre, sans un cri… une cabane de cadavres (Victor)

Les mauvaises herbes qui assassinent les plus belles fleurs, les branches cassées, déracinées (Emile)

 


Choses réjouissantes

Consolons nous car ces voisins encombrants, les nuages, vont nous réjouir avec cette pluie douce, cette pluie forte, qui nous apporte la verdure et la vie (Kevin)

Les grenouilles, heureuses dans nos eaux, réparent tout et me console (Emile)

Les mares, les cabanes, les peintures, les fleurs, les fruits et les légumes (Léonard)

Les fleurs, le compost, les merveilleux bruits des animaux (Félix)

Les fruits de l’amélanchier qui rosissent, les parfums quand on entre dans le jardin, la masse odorante du rosa multiflora, la promesse des mûres…trop de merveilles en ce 1er juin (Christiane)

La musique des feuilles de tremble sous le vent, le parfum des branches de cassissiers, l’odeur des confitures (Valérie)

Les abeilles qui butinent les fleurs blanches, menant leur vie sans rien faire d’autre, les pompons sur un châtaignier, sortes de fruits vifs et colorés, les cris des oiseaux annonçant les temps chauds (Séphora)

Les fleurs de printemps qui éclosent sur les arbres, les fleurs de sureau avec lesquelles nous feront de la limonade, miam ! (Lou)

Que de choses réjouissantes dans ce jardin ! (Titouan)


Choses bien cachées

Je n’ai pas eu le temps de les trouver (Agnès)

En ce dimanche même, avec un voile céleste si bas que la Deule s’y est perdue, que peut-il y avoir de si bien caché, si ce n’est des majestueux cumulus, des cirrus songeurs… les arpenteurs des stratosphères, les nuages de nos rêves ! (Kevin)

Bien cachées sont les choses désolantes ! (Titouan)

Le hérisson et ses petits, tapis dans les hautes herbes, la merlette qui couve ses œufs tachetés (Valérie)

Une mare dont le cadenas clôture la porte, une mare dissimulée sous les herbes où nage sans aucun plaisir une grenouille verte, le jardin, caché derrière de hauts grillages d’un parc, formant une barrière entre l’usine et le rosier (Victor)

Les grenouilles, les tritons, les œufs de Pâques (Nils)

Les oiseaux, les têtards qui gigotent et changent de logis aussi vite que le vent (Emile)

Un poteau de bois où des rubans déteints sont accrochés, les animaux ; en tendant l’oreille on peut les entendre mais jamais les voir (Séphora)

Les tritons de la Maravane, les hérissons à midi, le clafoutis dans l’abri, le soleil (Christiane)

Les ressorts dans le labyrinthe, la boîte de jus de fruit, un ballon de foot, les grenouilles (Félix)

Des champignons, une flèche en bois (Léonard)

Un abri pour les hérissons, les orties malfaisantes, l’amour que nous portons à ce jardin magnifique (Lou)