Nouvelles naturelles de Février – Rana la grenouille

image: Fraukefeind, Pixabay

Les amours de Rana, la grenouille rousse

Premières journées de printemps, soleil au Bizardin ce jeudi 16 février ; Michel et moi-même en profitons. Les oiseaux chantent dans tous les coins ; les primevères fleuries près du châtaignier, quelques arbustes précoces au sortir de l’hiver nous enchantent : à côté de l’hôtel à insectes, les premières abeilles de la saison se précipitent sur le chèvrefeuille fragrantissima le bien nommé, au parfum indicible, la viorne voisine arbore ses jolis pompons roses, les jasmins d’hiver à l’entrée du jardin et sur la clôture sont en pleine floraison jaune, le laurier-tin dans la Bizombre* aussi.

Michel sans relâche replante des piquets de saule dans le labyrinthe, ce qui renfeuillera le bas des arches dégarnies. Moi je coupe des perches de noisetier (bois plus résistant que le saule) et les débite en tronçons en vue de faire une petite clôture le long de la future bande fleurie, devant la Mare aux dragons.

Eh bien, justement, il s’en passe de belles lorsqu’on s’approche discrètement de cet endroit !

Sachez d’abord que la grenouille rousse, nommée en latin rana temporaria, est l’hôte principal de notre jardin. Et que, pendant l’hiver, monsieur Rana s’envase au fond de la mare pour être le premier occupant au printemps ; il reste immobile, respire par la peau. Madame Rana, elle, hiberne sous les feuilles, les tas d’herbe.

En février, grand branle-bas, tout le monde à l’eau ! Ce 16 février, nous avons pu assister à un spectacle pas banal : les messieurs en surface, très nombreux (on les repère à leur gorge blanche), donnent de la voix pour attirer les dames, un ronronnement grave assez discret ma foi : « grrouk…grrouk…grrouk ». Dès que madame Rana arrive, une agitation invraisemblable s’empare de ce petit monde, on se marche dessus. C’est qu’il y a de la concurrence, les dames sont deux fois moins nombreuses que les messieurs. Sans façons, Monsieur Rana, qui a de la chance, s’agrippe à madame et l’enserre puissamment de ses pattes avant sous les aisselles. Madame pond alors ses œufs (jusqu’à 4500), fécondés au fur et à mesure par qui vous savez. Dès qu’elle a pondu, madame Rana sort de l’eau. Les messieurs y restent dans l’espoir d’autres rencontres. A voir sans tarder un jour de soleil, la reproduction dure plusieurs jours.

Vous pourrez observer les œufs, des amas gélatineux au bord de l’eau, qui donneront naissance aux têtards dans deux ou trois semaines. **

PS : dernière nouvelle, le Bizardin est sur le point de se marcotter !

Au sortir du jardin, on remarque d’abord que les grandes lettres de BIZARDIN et les silhouettes d’enfants sont repeintes grâce aux petites mains de Julien et Valérie ; puis côté jeux, que rosiers, lierre, houblon et autres plantes volubiles débordent de la clôture et sont prêtes à envahir le Terrain sans Nom dit Terrain des Métallurgistes. 

Ça donne des idées pour la suite : Guillaume Cardey, de la Soreli, aménageur de Fives-Cail, nous suggérait l’autre jour de réfléchir à comment faire une jonction heureuse entre le jardin et le terrain. Pourquoi pas un marcottage*** général, ça serait rigolo, non ? La clôture disparaitrait sous la verdure.

* Bizombre : passage ombragé derrière la Butte aux enfants.

**Histoire tirée de https://fr.wikipedia.org/wiki/Grenouille_rousse

*** marcottage : dans la nature, une branche d’un arbre ou arbuste suffisamment flexible qui touche le sol peut s’enraciner peu à peu par simple contact et donnera une nouvelle plante toujours reliée à la plante mère ; c’est le cas du chèvrefeuille par exemple, et de bien d’autres plantes, grimpantes ou pas. La championne de ce marcottage naturel est la ronce, qui envahit ainsi très vite un terrain. Le marcottage est aussi une méthode utilisée en horticulture, comme le bouturage, pour multiplier les plantes.

Christiane